Lancée à l’automne 2019 par la CCVG, une consultation de maîtrise d’oeuvre pour la construction de nouveaux locaux pour l’Office de Tourisme a permis de désigner l’agence Link Architectes pour piloter le projet.
Les contours du projet
Le bâtiment sera édifié sur le site du Plat de l’Air à Chaponost, face à l’Aqueduc romain du Gier, monument emblématique de notre territoire.
Évolutif, performant énergétiquement et intégré dans son environnement paysager, l’édifice, d’une centaine de mètres carrés, comprendra des locaux administratifs pour les équipes de l’Office de tourisme (bureaux, salle de réunion avec coin cuisine, locaux techniques) mais aussi un espace d’accueil du public (présentation de documents, boutique…).
Aux abords du bâtiment, les aménagements extérieurs proposeront des toilettes publiques, un accès PMR ainsi qu’un quai pour les autocars.
Le point de vue des architectes
Au début de l’été, au sortir d’une période perturbée par les mesures de confinement, Gérald Lafond, Romain Chazalon et Jérôme Glairoux, les architectes associés de l’agence Link Architectes, ont pu présenter les premières esquisses de leur projet.
L’occasion d’évoquer leur vision et ce travail singulier dans un site remarquable.
Trois questions à Jérôme Glairoux
Pouvez-vous nous présenter Link Architectes ?
Link architectes est une structure comprenant 3 architectes associés co-gérant et deux salariés, installée à Lyon.
Depuis la création de l’agence en 2010, nous travaillons principalement sur des projets d’équipements publics et de logements d’échelles variées en Auvergne Rhône-Alpes. L’agence a notamment été lauréate des Albums des jeunes architectes et paysagistes 2018 (AJAP 2018)*
Qu’est-ce qui vous a motivé pour répondre à la consultation de maîtrise d’œuvre lancée par la CCVG ?
Nous avons répondu à l’appel d’offre lancé par la CCVG parce qu’il était porteur d’un projet raisonné et utile pour son territoire. Nous pensons, bien loin des grands projets spectaculaires, que l’architecture a toute sa place dans les situations ordinaires et locales, pour révéler les singularités et qualités des paysages qui l’entoure.
Le site de projet proposé pour la construction de l’office du tourisme de Chaponost est chargé d’histoire, dans un lieu remarquable, qui nécessite la présence d’une intervention à sa juste mesure. Nous apprécions particulièrement ces situations qui nous permettent d’interroger plus largement un territoire, un paysage, pour faire en sorte que l’architecture s’y intègre durablement, avec pertinence et sens. Autre intérêt, celui de la création d’un lieu qui accueille, un lieu d’échange et de rassemblement généreux envers les habitants et les visiteurs. Nous pensons que l’architecture doit jouer ce rôle, pour tous et pour chaque lieu.
Ce qui nous intéresse donc avant tout autre chose, c’est de faire des bâtiments qui correspondent aux lieux dans lesquels ils prennent place. Nous n’avons donc pas d’idées préconçues, pas de principes pré-établis, pas d’a-priori. C’est le sujet et le lieu qui façonnent le récit de notre intervention.
Ici, évidemment, nous sommes confrontés frontalement avec une partie de l’héritage romain. Cette présence de l’aqueduc du Gier est une richesse inestimable. Le site de projet du Plat du l’Air est stratégique parce qu’il est en prise direct avec les derniers fragments tangibles de la mémoire romaine du territoire. Et quand nous nous sommes rendus sur place, nous avons pu prendre la mesure d’une entreprise telle que l’édification de cet aqueduc, à l’époque romaine, pour acheminer l’eau sur des distances très importantes. Nous avons pu aussi nous rendre compte de la présence matérielle puissante de ces traces.
Quelles sont les lignes directrices qui guident votre proposition ?
Notre première interrogation était la suivante : comment arriver à établir un dialogue entre une architecture contemporaine qui est le reflet de son époque et ce vestige au caractère intemporel ?
Donc nous avons pensé qu’il s’agissait de répondre en réalité à deux questions simples :
Comment penser et construire un nouveau bâtiment qui fasse sens dans ce paysage ?
Comment mettre en scène les conditions idéales à la scénographie que va accueillir l’espace ?
Nous avons donc plutôt tenté d’imaginer le projet dans un premier temps comme une infrastructure de services plutôt qu’un bâtiment, un peu à la manière de l’aqueduc. L’intention étant de ne pas réduire l’intervention à un objet construit, isolé, mais d’abriter un espace qui, d’une certaine manière, n’a ni début ni fin, qui embrasse tout le paysage qui lui fait face.
La taille modeste du projet (100 m2) rend complexe la relation que nous cherchons à instaurer avec l’aqueduc. Il ne peut pas rivaliser en terme de dimension. Il faut étendre le domaine de réflexion du projet au site, au paysage, aux sols et aux parcours. Le projet devient un dispositif scénographique propre qui met en scène l’aqueduc sous le regard des visiteurs. C’est de cette manière qu’une forme de résonance est possible dans le vis-à-vis entre le projet et l’aqueduc. Le projet est un faire-valoir de l’aqueduc. Moins un objet architectural que la construction d’un paysage.
Le bâtiment ne s’appréhende pas d’un seul coup d’œil et de manière instantanée. Il invite au mouvement, au parcours et se dévoile dans l’articulation de ses espaces par la marche, la traversée, la pratique à l’échelle humaine. Il est en soi une scénographie au service de la mise en valeur de l’aqueduc. La simplicité formelle apparente cache une richesse des dispositifs de mise en relation des espaces en relation à la vue sur l’aqueduc. De ce point de vue, l’utilisation d’un grand mur s’est avéré stratégique. Ce mur à la fois soutènement et assise du projet tient la parcelle et construit le paysage. Il fait référence aux lignes géographiques de l’aqueduc et instaure le dialogue à l’échelle du site. La fonction d’abri étant alors assurée par un toit posé de la manière la plus élémentaire sur ce mur. Donc finalement on essaye de réduire le propos à ces intentions élémentaires : un mur qui installe le projet dans le site et organise les usages, et un toit qui abrite.
* Prix national décerné tous les deux ans par le Ministère de la culture récompensant les architectes de moins de 35 ans dont « les projets ou travaux se distinguent par leurs sérieux, leur force d’innovation et leur engagement, et qui ouvrent de nouvelles pistes de réflexion sur l’architecture et le paysage de demain ».